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CAR TEL EST NOTRE BON PLAISIR

La Suisse et son Tribunal Fédéral

Par Edmund Schönenberger

Traduit de l'allemand par J.C. Simonin

 

Le Tribunal Fédéral a une drôle de mine, lorsque l'on examine en détail le rapport de son activité pour l'année 2001.

 

"Car tel est Notre bon Plaisir!"

 

La Suisse et son Tribunal Fédéral

 

Partout où je me déplace dans le monde, les gens expriment leur admiration lorsqu'il est question de la Suisse. Il semble que ce soit le pays où coule le lait et le miel. L'étranger habituel apprécie le chocolat de notre Mère Helvétia, le monde étranger des affaires apprécie l'efficacité et la  sûreté avec laquelle sont menées toutes sortes de transactions, avant tout financières. D'un point de vue général, on vante un système parfaitement rodé. Naturellement, la plupart des gens ne savent pas que ce système est  discrètement surveillé par le Tribunal Fédéral.. Il n'ont bien sûr jamais eu affaire à lui.

 

Manque de chance, après bientôt 40 ans que je suis gavé d'études de Droit, d'activité de greffier de tribunal et d'avocat  fournis par la même cuisine, j'ai le plaisir douteux de découvrir pour les enthousiastes la face cachée de la médaille.

 

En premier lieu, je laisse exploser la "Démocratie" suisse comme une bulle de savon.

 

Par définition, le Souverain ne peut être souverain que dans la mesure où il contrôle le pouvoir. Le médium qui régit incontestablement le monde et met tout en mouvement est l'argent. Un coup d'oeil critique sur la Constitution suisse nous fait découvrir que ce n'est pas le "peuple" prétendument "souverain" qui possède la gigantesque  fortune  produite par les impôts et les intérêts accumulés depuis Adam et Ève, oh non ! le pouvoir de disposer sur ces sommes astronomiques demeure expressément réservé à un petit nombre de propriétaires.

 

Non seulement dans les faits, mais même de par la Constitution, la Suisse se présente ainsi comme la parfaite dictature de quelques riches , comme une ploutocratie modèle. Un peuple minable garde le trône, trompé et asservi par ces seigneurs ivres de la richesse nationale.

 

Je m'attends à une réaction de surprise. Et si j'ajoute malicieusement que j'ai proclamé mon propre État libre - mon territoire est de la taille de mes semelles de chaussures et se déplace sans cesse -   j'ai alors les rieurs de mon côté.  Les choses se passent alors très vite et mes interlocuteurs sont soulagés d'apprendre que dans cette ploutocratie alpine, tout ce qui brille n'est pas or.

 

Le rapport d'activité du Tribunal Fédéral suisse

 

Il n'est guère difficile de déboulonner le Tribunal Fédéral de son auguste socle.

Il suffit tout simplement d'examiner l'un ou l'autre des ses rapports d'activité. Nous nous en tiendrons pour cette fois au dernier rapport, celui de l'année 2001

 

Nos hauts magistrats gémissent sous le poids des affaires ainsi que sur le travail à la chaîne

 

Oh ! les pauvres gens...

 

Durant toute mon existence, je n'ai remarqué dans aucun temple de Justice que le personnel courait de cas en cas. C'est littéralement le contraire: Les moulins de la Justice tournent très, très, lentement......

 

Et les chiffres le prouvent définitivement: C'est ainsi que sur les 5'047 cas jugés par le TF au cours de l'année 2001, 466 ont été préparés par des juges auxiliaires. Pour ce faire, ils y ont consacré 1'036 jours, ce qui fait 2,22 jours par cas.

 

Sur les 4'581 cas restants se sont précipités 30 juges fédéraux ainsi que 94 greffiers. Toute personne informée sait qu'en général, un seul fait le boulot par dossier, les autres hochent la tête (Circulation 2'728, procédure simplifiée avec trois juges seulement 1'741, procédure présidentielle 456, séances 122. (Eh oui ).

 

Admettons que ces 124 Messieurs-Dames  - davantage de messieurs que de dames - au cours de 45 semaines ont bossé dur durant 5 jours, cela fait un total de 27'900 jours. Si l'on multiplie  maintenant ces 4'581 cas par le facteur connu 2,2, on arrive à quelque 10'169 jours de travail effectif. Que diable fait-on au TF durant les autres 17.731 jours ?

 

Ben, c'est simple, on se plaint de trop bosser..........

 

Et si l'on examine les activités de ces infortunés, il devient clair que les sujets ne méritent pas de meilleurs juges:  2.466 requêtes sont rejetées, pour 1'402, on entre même pas en matière, 563 sont caduques et quelque 610 (12,1%!) sont acceptées.

 

De quelle mouche ces braves Suisses sont-ils donc piqués, qui accourent 88 fois sur 100 pour des prunes devant le TF ? Quel incroyable gaspillage de temps et d'énergie et d'argent !

 

La norme qui supplante toutes les normes !

 

Pour découvrir ce que la TF entend par travail à la chaîne, nous devons simplement étudier l'une de ses nombreuses  méthodes de percer le coeur de ses clients et de les saigner à blanc.  Pour ce faire, nous utilisons l'Internet mentionné dans le rapport d'activité. et sur lequel "en garantie de la transparence de la jurisprudence, " 51,2 % des cas traités sont censés être décrits.

 

Demandons par le moteur de recherche l'art. 90 al. 1 lit. b de la loi d'organisation (LO). Chacun sait que cet article permet de bousiller une requête, parce qu'étant insuffisamment justifiée. Mais prenons garde ! On risque bien de se noyer et il est instamment recommandé de suivre les recommandations qui nous empêcherons de risquer notre santé lors de l'utilisation. Après une série impressionnantes de pressions, on arrive au 500ième résultat et la relevance - indiquée par une couleur jaune - demeure au maximum. La machine nous informe aussi que la "question (est) trop longue et trop complexe. ..." Il faut donc réduire la durée la période de recherches. Et de cette façon, l'on apprend après d'interminables cliquements qu'entre le 01.01.2000 et le 15.09.2002, l'art. 90 al. 1 lit. b LO aura été dérangé environ 1.197 fois. Une recherche effectuée parmi les cas "non transparents" serait sans doute encore plus catastrophique. Sans aucun doute, le paragraphe en question est devenu le plus important de toute la jungle judiciaire suisse.

 

Il serait faux et déplacé de prétendre que des requêtes présentées par des profanes sont ainsi élégamment éliminées du registre. Si l'on prend les 50 premiers résultats de l'an 2002 sous la loupe, obtenus à la suite d'une décision, on s'aperçoit que 24 de ces 50 cas ont été présenté de manière professionnelle par des avocats. Étant donné que ces derniers disposent  d'une formation et d'une connaissance de la jurisprudence fédérale en tout point équivalente à celle des juges fédéraux, ils sont tout autant  en mesure de justifier une requête qu'un juge de la rejeter. Que des juges fédéraux  remettent en place des gens aussi bien formés qu'eux à l'aide de formules méprisantes signifie qu'ils ne disposent plus d' arguments valables et qu'ils ne leur reste plus qu'à célébrer le Pouvoir en place du Droit, dans le but de protéger strictement l'ordre existant en même temps que les intérêts des ploutocrates.

 

Le "quod est probandum" nous est fournit par  un cas récent  pris au hasard. Il est décrit dans les termes suivant par le TF:

 

X a en date du 30 décembre 1997 déposé plainte auprès du Tribunal de District de Zurich contre le Canton de Zurich. Il demandait que le Canton soit tenu de lui verser une indemnité de 2,6 millions de francs plus les intérêts à 5% à partir du 1 février 1997, et que le Canton reconnaisse la violation des garanties de la CEDH pour cause de détention illicite ainsi que de traitements forcés illégaux et inadmissibles. En même temps, il demandait une assistance judiciaire gratuite, ainsi qu'un avocat d'office.

 

Le lecteur non averti pense automatiquement, que voilà donc un malappris, qui exprime sa rage d'avoir été fourré dans un asile psychiatrique et qui l'exprime par le moyen d'une demande  d'indemnité fantaisiste. La chose se présente tout à fait différemment lorsque l'on apprend que cette personne, qui n'a littéralement jamais fait de mal à une mouche, a été interné  durant  26 ans et a été soumis sans interruption à des traitements forcé. Ce fait d'évidence est tu par le TF.

 

Bien entendu.

 

Car comment aurait-il pu refiler à un public stupéfait la décision que la plainte n'avait aucune chance, alors qu'à l'époque l'autorité de tutelle compétente aurait dû obligatoirement confirmer l'internement, et qu'une telle confirmation n'a jamais été obtenue ?

Et comment aurait-il pu rendre plausible que même les traitements forcés et ininterrompus rendaient la plainte irrecevable, alors qu'il avait dans un autre cas constaté lui-même que le règlement cantonal incriminé n'offrait aucune base légale pour un traitement permanent ?

 

Ce catalogue pourrait être étendu indéfiniment. La preuve irréfutable que le TF se ferme intentionnellement est fournie par l'instance subalterne, le Tribunal de cassation du canton de Zurich donc, confronté aux mêmes arguments que le TF. Il avait décortiqué ces arguments et les avait donc compris. Il est évident que le TF a très bien compris, mais a préféré se tirer d'affaire au moyen du texte pré -fabriqué enregistré dans son ordinateur selon le principe de la bande de montage.

 

Pour encourager les râleurs confrontés avec le prochain rapport d'activité: Le but visé est parfaitement évident. Le TF désire décider tout à fait arbitrairement et librement sur quoi il désire rendre des décisions.

 

Que faire ?

 

Le présent se révèle comme une nouvelle édition du passé.  De génération en génération, la nature humaine s'impose éternellement. Le roi exige la courbette et ajoute: "Car tel est Notre bon Plaisir !" Il serait plus correct de remplacer l'art. 90 al. 1 lit. B OG par ce texte. Ou encore mieux, de supprimer le TF. Les sommes économisées sur un système enflé ainsi que les millions investis par les victimes dépassent de loin les indemnités accordées.La plupart du temps, il s'agit du reste seulement de détails de nature formelle, qui ne changent rien au fond du problème.

 

Le siècle qui vient de se terminer est entre autre entré dans l'histoire avec un "Führer" élu - comment pourrait-il en être autrement -selon les règles démocratiques et restera de loin le plus sanguinaires de l'histoire mondiale.  Quiconque réalise cela ne perd plus son temps à implorer les "Droits de l'Homme". Il est plus réaliste de s'en tenir exactement à la réalité - à la dictature. C'est ainsi que les stratégies se développent d'elles-mêmes pour défendre ses propres intérêts contre ceux des seignieurs .  

 

 

                     Edmund Schönenberger