Les étonnantes ressemblances
entre l'Inquisition et la
Psychiatrie forcée par Edmund Schönenberger Traduit de l'allemand par J.C. Simonin
L'Inquisition a emprisonné les gens. La psychiatrie forcée également a
recours à ce moyen. Dans les geôles de l'Inquisition, les gens ont été
torturés. La même chose se produit dans les asiles psychiatriques. Les
différences sont tout au plus dans les méthodes. L'Inquisition pratiquait la
torture directe. La psychiatrie forcée opérait une fois avec la lobotomie, la
stérilisation, l'électrochoc, la camisoles de force, le bain couvert., etc...
À l'heure actuelle, les détenus sont contraints d'avaler en tant que
médicaments des poisons sournois attaquant le système nerveux. Si un détenu
refuse, un groupe de gardiens pouvant s'élever jusqu'à une douzaine de
personnes se rassemble. La victime sera empoignée, attachée sur son lit, et
les substances pompées de force dans son corps au moyen d'une seringue. Un point commun aux deux institutions est le soi-disant aveu. Les
victimes de l'Inquisition étaient soumises à des interrogatoires sous la
torture, jusqu'à ce qu'elles avouent leur sorcellerie. Les victimes de la
psychiatrie forcée doivent avouer qu'elles sont mentalement malades. Il se
produit un véritable lavage de cerveau. Dès le début de l'internement, en tous
cas dans la clinique, il leur est communiqué par les médecins qu'elles sont
malades. À leur protestation, il est répondu qu'elles sont malades et ne
veulent pas le savoir. Le refus de savoir qu'elles sont malades est
interprété comme une preuve supplémentaire qu'elles sont mentalement malades.
Un piège infernal. On déclare aux victimes qu'une libération n'entre en ligne
de compte que lorsqu'ils admettent qu'elles sont malades. Cela les contraint,
dans un processus pouvant durer des semaines, des mois ou des années, de
retourner totalement leur conscience et finalement de passer à l'aveu requis.
Un aveu superficiel ne suffit nullement et ne sera pas accepté par les
docteurs. Afin de fixer définitivement la notion de maladie mentale, le
détenu fraîchement libéré a l'obligation de se soumettre au contrôle d'un
docteur et de continuer à prendre les "médicaments". En cas
de refus, un nouvel internement est envisagé. La masse des psychiatrisés de force se transforme ainsi en êtres
stupides, angoissés, intimidés, dévots, en tout état de cause marqués pour le
reste de leur existence. Seuls quelques uns réussissent à faire bonne mine à
mauvais jeu, à rester stables, à tromper les docteurs et à s'en sortir. Grand
est le nombre de ceux qui se brisent au cours de la procédure. Ils sont mis
au rancart comme des "chroniques" et passeront pratiquement le
reste de leur vie derrière les murs. Est éliminé est - au contraire de l'Inquisition - le bûcher. Mais il se
trouve plus de morts dans les asiles de fous qu'ils y a eu de sorciers brûlés
jadis. Le taux de suicide dans les asiles et à la suite de tels séjours est
environ 100 fois plus élevé que dans la population dite "normale".
Les procédures humiliantes - les enlèvements et transports vers l'asile, en
cas de résistance avec police et menottes, la médication forcée, en
particulier les injections et les menaces afférantes, la suspension de tous
les droits fondamentaux - laissent apparaître la mort comme le moindre mal.
Les traitements aux poisons nerveux se terminent souvent par la mort.
L'élimination secrète et non plus publique de personnes doit avoir un rapport
avec le changement de style apporté par la Révolution française et
perfectionné par la Révolution russe. Les têtes couronnées, qui s'étaient
montrées jusqu'alors en grande pompe, pouvaient être raccourcies sans
problème. Cela a incité toute la clique régnante à disparaître dans la
clandestinité et de développer son empire - ploutocraties déguisées en
démocraties - dans le monde entier. La discrétion est devenue l'un de leurs principes dirigeants. Des
fanaux tels que l'autodafé, le billot ou la potence sont évités. La méthode
préférée actuellement consiste à conserver les éléments
"dérangeants" le système d'oppression dans des institutions de
masse et à se débarrasser des morts sans faire de bruit. L'Inquisition et la psychiatrie forcée connaissaient, resp. connaissent
la punition reposant sur le soupçon. Cela signifie qu'il n'y a besoin
d'aucune preuve, qu'il suffit d'un simple soupçon de sorcellerie, resp. de
maladie mentale, pour provoquer les sanctions prévues. Une dénonciation
amenait les organes de l'Inquisition à agir. À l'heure actuelle, un simple
coup de fil à un psychiatre suffit à se débarrasser d'une personne gênante. L'Inquisition et la psychiatrie forcée ont en commun le secret absolu.
Les bourreaux de jadis devaient faire le serment solennel de ne souffler mot
à quiconque de leurs activités. Le personnel d'un asile doit compter avec des
poursuites judiciaires si il révèle des secrets. Les procédures judiciaires
étaient et demeurent secrètes. Jadis comme aujourd'hui, les défenseurs des sorciers, resp. de malades
mentaux sont menacés d'interdiction professionnelle. Les sorciers et les malades mentaux étaient, resp. sont abordés avec les
mêmes euphémismes: "Nous voulons seulement t'aider et délivrer ta
pauvre âme du Malin et de la damnation éternelle.", tel était le refrain
servi aux sorcier par les Inquisiteurs. "Nous voulons prendre soin de
toi dans le cadre protégé d'une clinique et te guérir, afin que tu redevienne
un membre intégré de notre société", suggèrent les docteurs au malade
mental. La psychiatrie forcée va même plus loin que l'Inquisition. À l'aube du
siècle passé, le principe de l'Eugénisme a été développé. Les
"malades mentaux" ne peuvent plus se reproduire. Quiconque
atterrit dans un asile de fous ne peut en fait plus avoir d'enfants. La
médication imposée rend impotent. Les diagnostics psychiatriques stigmatisent et encombrent les catalogués
massivement lors de recherche d'un(e) partenaire. Selon le jugement de leur temps, les inquisiteurs et leurs patrons
étaient des personnalités hautement respectées. La même constatation
s'applique aux organes de la psychiatrie forcée. Seul le jugement de
l'Histoire a enfin démasqué l'Inquisition comme l'infâme instrument du
pouvoir qu'elle était. La psychiatrie forcée appartient encore au présent. Je
suis cependant confiant que l'Histoire la jugera comme elle a jugé
l'Inquisition. Aucune époque n'a jusqu'à présent duré éternellement. Chaque
époque s'est effondrée tôt ou tard. Quiconque n'entend pas les grincements
dans l'armature de la psychiatrie forcée, ne voit pas les secousses dans le
toit et les fondements de la présente ploutocratie occidentale est sourd et
aveugle. 21 septembre 1994 |
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