À BAS LA DÉMOCRATIE Un plaidoyer pour tous les
cas par Edmund Schönenberger Traduit de l'allemand par
J.C. Simonin Wissiflue 1986
Pour: Natascha, Dana, Nana, Kaja Préambule Journellement, j'ai
affaire avec les tribunaux, ou souffle le vent de la Liberté, de la
Démocratie et du Droit. Mais je ne vois pas la Démocratie, n'entends pas la
Liberté, je suis avocat et ne crois pas en le Droit. Comment peut-on
supporter cela? Par un plaidoyer
standard. Cela m'épargne une dispute avec les juges au sujet de savoir si la
critique contenue dans mes plaidoyers est relevante ou non. Et ainsi, je
fournis ce discours et délivre à l'ombre de son effet destructeur mes clients
des intrigues de l'autorité. Et si la Justice se
retourne contre moi - voici mon plaidoyer standard. Le peuple est-il au pouvoir? La
tromperie la plus réussie de l'histoire de l'humanité consiste en nous faire
croire que les pays occidentaux sont régis par la volonté du Peuple. Dans le
style d'une réclame coca-cola, on nous répète tous les jours et sur tous les tons: "Liberté, Démocratie et État de Droit" Il
est vraiment temps de faire cesser cette farce. Considérons le pays
qui se targue d'être l'une des plus vieilles démocraties du monde, la Suisse.
On voit un pays qui se ratatine et des localités surpeuplées. Cinq habitants
sur cent travaillent encore la terre, le reste passe sa vie dans des villes
ou agglomérations. Le peuple a-t-il voulu
ce développement? Non! Au coeur de la Suisse
se trouve Zurich. Faisons une promenade à travers cette ville mondaine. Que
voyons-nous? Une fabrique après
l'autre, un atelier après l'autre, un bâtiment de bureaux après l'autre, un
centre d'achat après l'autre, un tempe de la
consommation après l'autre, un bloc locatif après l'autre. Les gens
s'affairent 24 heures par jour. Á l'heure des repas, c'est une avalanche
humaine qui se déverse
dans les rues, Du dodo au boulot et à l'industrie des loisirs,
puis retour au dodo. De temps à autre, on s'achète une vacance, histoire
d'occuper un bout de plage ou territoire équivalent. Ce bon peuple est-il
maître de son quotidien? Non! Je me représente Zurich
il y a plus de cent ans: Là où la Limmat quitte le
lac, se trouvent des deux côtés de la rivière quelques maisons, certaines
modestes, d'autres déjà cossues. Depuis le clocher de quelques églises
s'égrène le son des cloches. Leur son se répand sur les champs et les marais
environnants. Wollishofen au Sud et au Nord, dans la vallée de la Glatt,
Seebach sont des hameaux endormis d'où les paysans se déplacent tout au plus
les jours de marché
et parcourent alors les quelque dix kilomètres pour apporter en
ville les récoltes de leurs champs. Ã mis chemin de
Seebach se trouve Oerlikon, en ce temps-là non moins agricole et endormi.
Aujourd'hui mondialement connu! On y fabrique des
canons. Il n'y a plus de paysans. Que s'est-il passé? Un beau jour, un Monsieur
déambule dans les prairies d'Oerlikon. Dans sa tête il a un plan qu'il a
combiné tout seul. Une consultation populaire n'a jamais eu lieu. Il
s'arrange rapidement avec les paysans du coin. Les prairies changent de
propriétaire. Le Monsieur embauche des ouvriers, qui fabriquent d'abord des
baraquements de chantier, puis une grosse fabrique selon ses directives. Le
peuple n'a décidé
ni sur la construction, ni sur ce que sera produit ni en quelle quantité. Une fabrique ne suffit
pas. La matière première doit être extraite de quelque part, transportée,
afin qu'à la cadence des machines succède le produit fini. Ce produit à son
tour arrive par de longs transports dans les canaux de vente et finalement à ses acheteurs. Le Monsieur a donc
déjà produit une mine, plusieurs entreprises de transport, une fabrique, des
centres de vente ainsi
évidemment que tout l'appareil administratif nécessaire à la
production et la vente à partier des prairies d'Oerlikon et d'ailleurs. Pour
les ouvriers, il fait ériger dans les environs des cités-dortoirs,
Schwamendingen et Affoltern sont brutalement tirées de leur torpeur. Et avant encore
qu'on le remarque, Wollishofen et Seebach sont bouffées par la ville. Le Monsieur et quelque
autres bonshommes ne lâchent pas. Sans la moindre consultation populaire, la
Suisse toute entière se transforme en Oerlikon et Schwamendingen. Les eaux
usées des fabriques empoisonnent les cours d'eau, les canalisations des
quartiers ouvriers débordent, les véhicules produits par les fabricants
engorgent les rues. La puanteur et le bruit empestent l'environnement. Et maintenant, il
pleut des consulatations populaires: "Voulez-vous voter un crédit pour
l'élargissement de la route reliant Schwamendingen et Oerlikon?"
"Êtes-vous d'accord de faire construire une station d'épuration dans la
vallée de la Glatt?" "Voulez-vous une
usine d'incinération
près du pont de Schwamendingen?" "Êtes-vous en faveur
d'un réseau d'autoroutes en Suisse?"
"Êtes-vous en faveur de la construction d'un réacteur atomique en vue
d'assurer l'approvisionement d'électricité en Suisse?"
"Êtes-vous en faveur de mesures visant à la limitation des dommages à l'environnement?" Le règne du Peuple
commence. Il règne sur de la merde! Après que le Monsieur
et ses complices ont mis sur pieds à eux seuls ce monstre suisse, cet organisme
hautement technique, hautement industrialisé, le peuple est juste bon pour en
subir les conséquences. Sans
trêve, il a à éventrer le solpour "l'infrastructure" - ainsi
s'appelle l'opération - pour les amenées d'eau, pour l'amenée d'énergie, pour
les cables de communication, pour les égouts. Il doit construire les routes
et les voies ferrées, à rendre possible l'apparition ponctuelle des
travailleurs à leurs lieux de travail, d'où partent les marchandises amenées
aux consommateurs. N'oublions pas les déchets, qu'il doit amener aux
dépotoirs et sur les tas de poisons. L'instruction publique
est l'affaire du peuple. Il forme à ses frais les armées de travailleurs, les
milliers de postes dont le Monsieur a besoin pour ses entreprises. Il
transporte sa correspondance et s'envoie à lui-même les factures, somations
et prospectus que le monsieur décide d'envoyer. Si quelqu'un ne veut pas
payer, il aura
l'Office des poursuites sur le dos. Le peuple garde la propriété du Monsieur et poursuit sans pitié quiconque
pénètre dans ses villas et ses palais en vue de prendre part à ses richesses.
Il entretient d'innombrables asiles dans lesquels seront enterrés vivants
ceux qui dérange le cours normal des choses et qui n'ont malheureusement pas
le don de tenir tête au potentat. Il met à disposition le percepteur, qui prélève
auprès des indigènes les impôts et les dîmes nécessaires à la construction et
l'entretien de "l'infrastructure" . Le Monsieur a depuis longtemps
déjà choisi de résider dans des oasis fiscales à l'étranger. Il paye les rentes
pour les survivants de ceux morts au travail et sur la route. Il prend soin
de ceux qui ont été assommés et rendus infirmes. Les entreprises du
Monsieur ont détruit les familles. Les vieux sont rejetés. Ainsi, le peuple
doit subvenir à leurs besoins. Qui donc supporte les charges du service de santé? Le peuple! Le peuple est
compétent pour tout cela ainsi que pour toutes les autres fonctions
auxiliaires et annexes. La chose principale,
la marche de l'entreprise, qui détermine le rhytme de vie actuel est
déterminée par le seul Monsieur, discrètement et à huis clos. Il n'aime pas
les regards inquisiteurs. Les compétences du peuple se limitent à attendre
ses décisions bravement devant sa porte et à les mettree en pratique de
manière précise. C'est avec ardeur que
le Monsieur assure le fondement de son pouvoir:
L'argent. Après les millions, il est en train d'accumuler les milliards.
D'ici peu, ce seront les trillions. Non seulement il détient l'or du passé,
non, il a également ajouté à sa fortune le dernier mètre carré de terrain,
les richesses naturelles, tous les objets mobiliers et immobiliers et tous
les services. Son pouvoir est gigantesque. La stratégie est
toujours la même. Un nouveau produit ou un nouveau service sont jetés sur le
marché. La publicité en vante les avantages. Les inconvénients sont
obstinément tus. Les masses ne peuvent plus résister à la tentation. Comme
des fourmis, elles grouillent autour des centres d'achats. alors qu'il y a un
demi siècle, quelques douzaines d'articles alignés sur des étagères suffisaient
pour vivre, il faut maintenant des millions d'attrapes, bien emballées et
présentées, pour attirer un public
Elles seront achetées, consommées et rejetées comme des déchets. Tel
est le sens de la vie actuelle, dicté par le Monsieur. Simple également est
la méthode de motiver le peuple à travailler. On lui fait entrevoir le
bien-être et une existence agréable et une fois par mois, on lui refile un
pourboire. Dans le cours du mois à venir, on le lui reprend jusqu'au dernier
rond. Et ce petit jeu se renouvelle de
mois en mois, d'année en année, durant toute une vie. Rien ne documente le
degré de "souveraineté" d'un peuple de manière plus impressionnante
que la manière simple avec laquelle on réussit à tenir ce
"souverain" dans un état de soumission. Le peuple est-il souverain? Bien sûr que non! Ce n'est pas une
démocratie, lorsque quelques rares Messieurs décident entre eux du mode de
vie de tout un peuple. Ce n'est pas une démocratie, lorsque le peuple est
asservi par ces quelques personnes et lorsque ses compétences se limitent à
prendre des décisions sur des sujets accessoires. Je traite de menteur
et d'escroc toute personne qui prétend que la Suisse est une démocratie. Ã bas le système actuel! Mais le peuple s'est donné à lui-même cette
constitution démocratique Il n'est pas simple de
mettre en scène une énorme escroquerie et il faut plus qu'une vue d'ensemble
pour ne pas en être victime. Mais lorsque l'on a démêlé l'écheveau de
mensonges, il n'est guère compliqué de reconnaître la trame du complot. Comment les
propagandistes des "démocraties" occidentales ont-ils jeté la
poudre aux yeux du peuple et planté tant d'arbres qu'il ne voit plus la forêt? Avec une ruse Ils ont présenté au
peuple une Constitution verbeuse, dans laquelle ils ont glissé un cheval de Troie: La liberté du Commerce, de l'Industrie et de la
Propriété. Officiellement, c'est là une liberté parmi d'autres libertés - liberté
d'expression, de religion, d'assemblée etc... mais par devers eux même, les
initiateurs savaient que cette particulière liberté finirait par annuler tous les
autres éléments d'une constitution par ailleurs démocratique. Car ils - et
seulement ils -détenaient déjà le pouvoir (l'argent, les moyens de
production, les relations commerciales, etc...) Des pauvres diables - du
peuple - ils n'avaient pas de concurrence à craindre. Et leur calcul s'est
révélé juste. Avec leur "liberté", ils ont pu faire ce qui leur
plaisait et mettre le monde sens dessus-dessous. La souveraineté du peuple suisse éclate comme une bulle
de savon. Car par définition, ne peut être souverain que celui ou
celle qui contrôle effectivement tous les moyens du pouvoir. Le médium qui
dirige le monde et décide de tout est indiscutablement l'argent. Un coup
d'oeil dans la Constitution révèle sans détours que ce n'est pas le bon
peuple prétendument "souverain" qui possède l'incalculable fortune
produite par les intérêts et dîmes accumulés depuis Adam et Ève, non, la
disposition sur ces sommes astronomiques demeure expressément réservée à une
minuscule troupe de propriétaires. Non seulement dans les
faits, mais également du point de vue de la Constitution, la Suisse se
présente ainsi comme une dictature des riches, comme une ploutocratie modèle.
Un peuple minable de mendiants garde le trône, trompée et asservie par les
seigneurs qui se sont emparés du patrimoine commun. "Voulez-vous donner le champ libre à quelques uns
qui disposent de tous les moyens, même si leur activité bouleverse votre existence?" Telle aurait été la
question correcte que l'on aurait dû poser au peuple. Seul un crétin aurait
accepté, ou alors quelqu'un profondément dépendant des privilèges de son
seigneur. Mais c'est pourtant une
démocratie, lorsque le peuple a en tous temps la
possibilité de modifier la Constitution
selon ses désirs Il est incontestable
que dans les constitutions occidentales, on trouve des quantités de détails
comme par exemple ces possibilités de révision. Mais cela aussi, c'est la
poudre aux yeux, ce ont les arbres qui cachent la forêt! Elles n'arrivent qu'à cacher au nigaud
l'obstacle qui remet tout en question. Imaginons une
constitution qui prévoit que tout le pouvoir se retrouve entre les mains d'un
roi, et qui prévoit qu'elle peut être modifiée à tout moment. Est-ce là une démocratie? Bien sûr que non! Car
ici règne et gouverne un roi tout puissant. On a instauré une monarchie
absolue. Ainsi que nous l'avons
observé, la liberté accordée à une minorité pourvue de tous les pouvoirs
produit une ploutocratie. Et elle le reste, avec ou sans révisions
constitutionnelles. La monarchie ou la
ploutocratie deviennent des démocraties lorsque le peuple priva de leur
pouvoir les ploutocrates ou le roi et s'accorda le pouvoir non seulement sur
le papier, mais dans les faits. Sinon, on reste cloué à la case départ. La Suisse a déjà la
preuve par l'exemple: Il y a quelques années de
cela, le peuple a eu l'occasion de se prononcer sur une initiative populaire
qui lui aurait donné la chance de participer un tant soit peu aux décisions
prises par les entrepreneurs. Le projet a été enterré. Il n'y a pas besoin de
se demander pourquoi: Un peuple mis sous tutelle par
le biais de manipulation et oppression continuelles ne peut plus récupérer le
pouvoir! Il suffit que les Messieurs menacent que le chaos s'installe, si on
leur rognait un peu les ailes. Et en fin de compte:
Les postes étaient déjà répartis - du PDG à travers les chefs et jusqu'au
petit shérif qui a le pouvoir d'humilier le citoyen, de le rosser même, sans
avoir à craindre qu'un loup vienne le bouffer. Si les hautes charges
- par le biais de la participation - avaient vacillé, les charges subalternes
également auraient branlé au manche. Ce n'était pas seulement les Messieurs,
mais toute la hiérarchie, qu'il fallait défendre. La Suisse devrait donc
présenter l'une des situations les plus claires: Une
révision dans le sens d'une plus grande démocratie n'a clairement pas eu
lieu. La liberté de commerce, d'entreprise et de propriété
dominent encore présentement. Les ploutocrates ont assuré leur pouvoir! Mais le peuple peut élire au
Parlement ceux et celles qui le
représenteront Seul un naïf croit
encore cet argument.. Tout comme il est possible
d'envoyer un Hitler au pouvoir par le biais d'une élection populaire, on peut
catapulter n'importe qui sur un siège du Parlement. Comme l'a dit une fois un
de ces bourrins de la publicité (entre temps décédé):
"Refilez-moi un million et d'un
sac de pommes de terre, je vous fais un Conseiller fédéral." L'argent domine le
monde ! Déjà un bambin haut comme trois pommes peut avec une pièce de monnaie
diriger la main de la vendeuse vers l'étagère où se trouvent les bonbons. Que
ce n'est pas le peuple, mais bien les messieurs qui détiennent l'argent,
personne ne le conteste. Rien de plus simple
pour eux que de vendre au bon peuple des personnes de confiance, comme l'on
vendrait n'importe quel autre produit, et de s'assurer ainsi une majorité
confortable. Même les minorités sont les bienvenues;
car elles donnent ce vernis de démocratie et ont un effet stabilisateur. Ã part cela, le
Parlement ou même l'État ont une fonction d'auxiliaire. Mais la Constitution prévoit pourtant,
que tous et toutes sans
exception ont les même droits. Ainsi, chacun a une chance. C'est ça, la démocratie! Qu'est-ce qu'on se marre! Prenons Monsieur X,
qui possède un milliard et Monsieur Y - égal devant la Loi - qui ne possède
rien. Les deux veulent faire des affaires. Monsieur X va à la banque et
obtient sans coup férir un prêt d'un milliard à 5% d'intérêt. Il rassemble
quelques stratèges, qui remarquent une niche commerciale. Ils construisent
une fabrique et engrangent les profits, qui rapportent 10% d'intérêt sur la
totalité de la somme. Il garde les 10% pour son propre milliard et livre 5% à
la banque pour le milliard emprunté. Les 5 derniers pour cent, il les confie
à la banque, qui fournira à toute une horde de petits crédits. Le bilan de
Monsieur X montre déjà une fortune nette de 1 milliard et 150 millions. Tournons-nous
maintenant vers ce bon Monsieur Y. Lui aussi, demande un crédit à la banque.
Là où il n'y a rien, on ne donne rien, telle est la réponse laconique. Mais
il ne se décourage pas. À force de travail, il est propriétaire d'un million,
après bien des années. Monsieur X a pendant ce temps doublé son milliard et
remboursé son crédit. Les deux se remettent
au travail. Les affaires permet le rendement
habituel de 10%. À la fin de l'année, Monsieur X dispose donc de deux
milliards et 200 millions. Monsieur Y se traîne avec 1 million et 100'000. Il
n'aurait une chance que si il bataillait encore plus
agressivement que Monsieur X. Ces différences
matérielles incroyables existaient déjà lorsque les Constitutions ont été
rédigées. Elles sont un obstacle à la démocratie. Mais voyons, ce n’est que de votre bien que nous
recherchons !
Et qui encore
paie les intérêts bancaires et les bénéfices d'entreprise? L'intégralité du
peuple ; car ils sont ajoutés sur les produits lui vendues ! Alors, voulez-vous des
conditions comme en Russie? Le dernier atout de
Monsieur X! Lorsque je l'entend
parler ainsi, je me crois un natif de la Russie. Je suis certain que là-bas,
il se serait retrouvé parmi les Messieurs et aurait peint pour le râleur
russe le diable capitaliste sur la muraille. Et cela, même pas à tort! Ce qui est mis au
pilori chez les Russes se retrouve en Occident bien caché et tu dans les
mêmes proportions. Les crimes contre les droits fondamentaux se suivent et se
ressemblent. Je rappelle le front
des hostilités en temps de paix, là où s'opposent les gardiens de l'ordre et
les fauteurs de troubles. Tirer pour tuer, torturer, râclées bestiales sont à
l'ordre du jour. Je peux en témoigner personnellement et n'ai pas besoin de
référer à feu le professeur de droit pénal Peter Noll, qui comparait la
justice pénale zurichoise à la justice militaire et fasciste de la Turquie. Je me souviens des
massacres quotidiens dans la rue et sur les places de travail. Chacun qui
s'asseoit au volant d'une voiture ( ou qui règle un
objet dangereux ) connaît très bien l'imperfection de l'homme et de la
machine. Il sait que lui ou d'autres participants au trafic seront imprudents
ou qu'un défaut technique pourrait apparaître. Il sait par exemple que des enfants ou des
vieillards traversent la chaussée sans crier gare. Chaque fois qu'il met son
véhicule en mouvement, il doit compter avec le pire. Il accepte cela. C'est
un dol éventuel, qui peut être transformé en dol tout court. Si une être humain est tué, c'est un homicide intentionnel. Que l'on se représente
la catastrophe pour ces
Messieurs les fabricants d'automobiles, si un juge venait à
juger avec cette aune parfaitement
correcte! Plus personne ne pourrait baguenauder en bagnole; car ce
serait une tentative d'homicide est donc punissable. Tout ces grasses
affaires se dissoudraient en son et en fumée! Les juges - eux même
automobilistes - ne reconnaissent donc que l'homicide par négligence. Les
victimes peuvent donc continuer à se faire bousiller sur les routes et les
Messieurs de la grosse industrie continueront joyeusement à prendre sous
contrat des légions de condamnés à mort. Je me souviens des
cliniques psychiatriques d'ici. Il y a quelques années de cela, j'ai libéré
par une intervention énergique un détenu qui avait été interné des années
durant et avait durant tout ce temps été journellement bourré de poisons
sournois. Il avait souffert un destin plus cruel que ce Russe célèbre qui
végète dans un exil moins inhumain et que la propagande occidentale met en
avant afin de ne pas être contrainte de nettoyer la saleté devant sa propre
porte. Que personne ne me
vienne avec les Russes. Après un an de séjour dans des pays communistes, je ne voudrais
pas être contraint de choisir entre l'Est et l'Ouest. J'ai également - une
simple digression - passé neuf mois en Afrique. Il me semblait être tombé de
la pluie suisse dans une averse tropicale. Et maintenant de retour, je me
retrouve sous une cataracte. À bas l'État de Droit! Dans l'exercice de mon
métier d'avocat, je
me retrouve confronté à des clients qui me racontent leurs histoires (la
plupart du temps causées par les ploutocrates). Souvent, il s'agit de prendre
contact avec l'adversaire du moment (dans un conflit de travail peut être
avec un subalterne du patron) en vue d'arriver à un arrangement. Si les
négociations échouent, il n'est pas rare que l'affaire finisse devant un
juge. Pour un procès pénal - l'une de mes spécialité
- la bataille devant une Cour de justice est inévitable, lorsqu'il s'agit
d'un délit se poursuivant d'office. Là-bas, on invoque la
Loi - une escroquerie non moins évidente que la démocratie! Admettons qu'un
cambrioleur se soit introduit dans les appartements de Monsieur X. - nous
avons déjà rencontré ce Monsieur. Sa fortune se monte entre temps - compte
tenu des intérêts simples et composés, ainsi que des nombreux gains
spéculatifs - à deux milliards et demi de francs. Le cambrioleur se sert
modestement et ne soustrait que quelque dix milles francs. Mais sa chance ne
dure pas: Au cours d'une fête avec des amis, la
police l'arrête et il se retrouve derrière les barreaux. Pour recouvrer sa
liberté, il avoue immédiatement, me charge ensuite d'assurer sa défense. À la suite d'un
invraisemblable cafouillage du juge d'instruction, qui demeurera cachée par
la suite, une copie de l'acte d'accusation avec ses annexes se retrouve dans deux
Cours de Justice différentes, dont l'une - la pêche de mon client continue -
se compose de trois juges gauchistes, des Poch, et l'autre de trois juges de
droite, des UDC. C'est avec quelque
étonnement que nous prenons connaissance des deux convocations aux séances,
découvrons le pot aux roses et ne réagissons pas. Nous nous retrouvons
donc aux deux séances consécutives dans les antichambres et les salles de ces
deux tribunaux. Selon une tactique
mise au point à l'avance, nous requérons les deux fois l'acquittement. Le
seul moyen de preuve consiste en l'aveu de mon client, qu'il rétracte chaque
fois dans les mêmes termes. Le jugement sera communiqué par écrit, nous
est-il signifié. Nous nous retirons
avec une satisfaction amusée. Car déjà nous savons ce qui va se passer. Les
juges gauchistes tiennent évidemment Monsieur X, dont ils combattent avec
véhémence les méthodes commerciales, pour le plus grand des escrocs et
témoignent toute leur sympathie pour mon client. Pour les juge UDC par
contre, ce dernier seul est un malfaiteur et Monsieur X un citoyen honorable. Les jugements tombent
en conséquence: Les gauchistes acquittent, la
rétractation est crédible. Les droitistes jugent coupable, la rétractation
n'a aucune valeur. Nul n'est besoin
d'avoir lu Tucholsky et ses additions de condamnations à mort prononcées par
des juges allemands de droite ou de gauche pour savoir que - le cafouillage
mis à part - mes élucubrations sont parfaitement réalistes. La preuve est fournie
par chaque affaire jugée - sur la base des mêmes faits exactement - par une
instance subalterne et supérieure et qui aboutit à es jugements différents.
De tels cas grouillent littéralement. Ces cas révèlent
l'escroquerie au grand jour. Tant les juges gauchistes que les juges de la
droite que les juges d'une instance subalterne et d'une instance supérieure
sont soumis exactement aux mêmes lois. Il est donc logique qu'ils arrivent
exactement au même résultat lorsqu'ils sont confrontés exactement aux mêmes
faits. Même topo, même loi,
jugements différents.......? La clé de l'énigme est
évidente: Les juges sont différents! Dans aucun jugement,
il n'est question de droit, ce sont simplement les opinions - arbitraires -
des juges qui s'expriment. Et plus leurs convictions morales et leur vue du
monde diffèrent, plus leurs jugements sont différents. En vue d'éviter cela,
on organise dans l'univers judiciaire des procédures de sélection rigides
destinées à tenir les moutons ensemble. Des exemples tels que celui fourni
par ce juge allemand (je te salue!) qui prononçait
systématiquement la peine minimale, jusqu'à ce qu'il fût limogé, ne font pas
école. Mais si l'on égratigne
la surface du Droit, on retrouve immanquablement le Pouvoir. Il dispose non
seulement de la Justice, mais également des deux autres Pouvoirs dans les
ploutocraties de styles occidental. Chacun est
familier avec les disputes au Parlement. Les gauchistes et consorts veulent
ceci, les UDC et compagnie veulent cela. Et comme les Messieurs se sont
assurés de la majorité, ils l'emportent régulièrement. Cela n'a rien à voir
avec le Droit, et tout avec le Pouvoir. À bas aussi l'État de Droit! Si l'on cherche par le
moyen d'une formule brève à définir les rapports entre le peuple et l'État, disons que le
peuple nettoie la merde des Messieurs, l'État organise le nettoyage et
organise le peuple. Le Droit pour les riches Le Devoir pour les naïfs Ce Monsieur X est
entré dans nos coeurs au point que nous voulons l'inviter à nous accompagner.
Nous avons déjà fait connaissance avec sa fortune. Juste entre nous: Cette année, son pactole a augmenté de 250 millions.
Il semble que quelqu'un lui doit pas mal d'argent. Nous en reparlerons. Monsieur X a confié la
conduite de son empire à cinq conseillers d'administration futés et
carriéristes, et la présidence à un excellent, dynamique vieux renard versé
dans la diplomatie. Cette équipe superlative mène l'affaire avec une telle
maestria qu'il n'a plus guère qu'à faire acte de présence à l'assemblée
annuelle ordinaire et à veiller que le quart de milliard rapplique
effectivement. Et il rapplique. Il est donc libre de
tout son temps. Il demeure dans une villa somptueuse, presque un palais,
entreprend des voyages tout autour du monde et sait vivre - un véritable bon
vivant ! Lorsqu'il doit payer quelque chose, il tire son revolver - pardon,
son carnet de chèque. Les chèques sont évidemment couverts. Peu à peu, on en a un
peu marre de Monsieur X.. Tournons-nous donc vers un citoyen lambda.
Et appelons-le poliment Monsieur Z. Monsieur Z, Z pour les
amis, habite une cité ouvrière à Schwamendingen et travaille à Oerlikon.
L'appartement de Monsieur Z est dotée de tout le
confort. Dernièrement, la vieille cuisine et la salle de bain ont été
démolies et refaites selon les normes les plus modernes. La
dernière fois qu'il a rencontré le facteur, il se réjouissait de recevoir une
lettre d'amour. Malheureusement, c'était seulement l'augmentation du loyer. Dans le salon
relativement petit, il a manoeuvré un dressoir imposant, ainsi qu'un sofa
rembourré et des fauteuils. On y trouve une télé, bien sûr, et à côté ça brille
fantastiquement. Je ne m'y connais pas réellement, mais cela doit être un
studio d'enregistrement. C'est sans arrêt que ça clignote et siffle, que les
lampes de toutes les couleurs scintillent. Par respect pour la sphère privée,
je n'irai pas jeter un coup d'oeil dans la chambre à coucher, mais elle doit
être bien. À défaut de cela, nous inspectons les pièces communes, partagées
avec les autres encasernés: La cage d'escalier et la
buanderie. Là, c'est moins bien. Monsieur Z ne faisait
pas partie du comité de planification. Étant donné que les
autres investissements immobiliers de la cité ne diffèrent en rien du bloc où
il loge, il le prend du bon côté. "Eh oui, l'égalité a du bon",
marmonne-t-il parfois. Au bord de la route il
retrouve son auto, qu'il soigne avec amour tous les samedis. Inutile
d'ajouter qu'il l'a acquis, ainsi que tout le mobilier déjà mentionné,
totalement à crédit. Tôt le matin - la
plupart du temps, il est encore au pays des rêves - les premières publicités
braillent déjà des haut parleurs en même temps que les bavardages joyeux.
"Bon, on y va", pense-t-il. Sans plus de cérémonie, il attrape son
bus et arrive à Oerlikon juste à temps pour pointer à l'horloge. Monsieur Z bosse sur
une chaîne de montage. Comme la machine marche déjà, il n'a pas besoin de se
chauffer les muscles. Il est tout de suite dans le coup. Il y a de la
poussière et du bruit. Mais il en a l'habitude. Cantine, signal, horloge pour
pointer, bus - retour à la caserne. Il fait un petit détour et passe par la poste
pour faire ses payements. Son salaire ne suffit pas tout à fait.
"Espérons que la gratte de Noël sera bonne", pense-t-il. Que la
poste dirige son blé sur Monsieur X, qui lui en est déjà à son troisième
milliard, il ne le remarque évidemment pas. Comme il est déprimé,
il saute dans sa bagnole et va faire un tour au centre d'achats de Glatt. Il
baguenaude de droite et de gauche, et plutôt que d'acheter - comme il en
avait l'intention - une nouvelle bande vidéo, il signe un contrat d'achat à
tempérament pour un PC. C'est fou ce que l'on peut faire avec ça, lui assure
le vendeur. Toutes ses tentatives de faire quelque chose d'intelligent avec
le machin en question, une fois rentré à la maison, demeurent sans succès. Il
range l'affaire dans son étagère, en s'efforçant -
en application du règlement de la maison - de faire un minimum de bruit pour
ne pas déranger les voisins derrière les parois minces. Tout le reste de la soirée, il reste avachi
comme un sac de patates devant la télé.
Et c'est comme ça le jour suivant et durant 49 semaines par an, tous
les ans. On a déjà discuté les trois dernières semaines. En Suisse, il y a
quelques milliers de X et quelques millions de Z. Les X symbolisent des sommes astronomiques,
qui doivent être rentables chaque année. Et c'est le boulot des Z, que de
jeter aux X les milliards en question. C'est de la connerie! Cela n'a rien,
vraiment rien à voir avec Liberté, Démocratie et État de Droit À bas tout cela!!! Que faire? L'on doit réfléchir intensément
pour comprendre pourquoi nos richards ont besoin de cette mascarade
démocratique. L'Histoire nous enseigne que la domination ne fait jamais
qu'osciller entre tyrannie et oligarchie. Au bon peuple incombe tout au plus
le soin de détrôner l'un pour mettre l'autre sur le pavois avant de le
chasser une fois de plus. C'est de cela que les
régents actuels ont peur. C'est pourquoi ils se dissimulent derrière la fable
qu'ils ne sont pas les maîtres. En fait, il sont bêtes à manger du foin. Ils n'auraient pas besoin
de ce jeu de cache-cache. La démocratie est une
chose impossible. Elle n'a jamais existé et n'existera jamais. On réussirait
bien plutôt de supprimer tous les mâles d'un troupeau de cerfs. L'être humain est
demeuré le même depuis la nuit des temps. Son cerveau ne s'est pas développé.
C'est avec la même rage qu'il décide de partir en guerre, lorsqu'elle est
refroidie, il y a la paix. Et même si la pyramide se retourne de temps à
autre avec fracas: Une pointe demeure toujours
encore dessus! Que la Suisse soit
l'une des plus ancienne démocraties est une fable.
Déjà lors de la fondation, il y avait les affranchis et les serfs, les
Stauffacher et les Reding avaient leurs valets. Les Confédérés ont envoyés
leurs baillis dans toutes les directions, les villes ont opprimés la
campagne. Durant sept ans, j'ai observé une landsgemeinde. Ce ne sont pas des
démocrates qui sont élus là-bas, ce sont des roitelets locaux, notabene pour
des fonctions accessoires. Même dans les Cantons primitifs, ce sont les
Messieurs X qui dictent leurs volontés depuis les coulisses. Les ploutocrates
n'auraient besoin que d'inculquer au bon peuple ces tenants et aboutissants,
et il leur mangerait fidèlement dans la main. Du coup, plus rien ne les
empêcherait de proclamer leur ploutocratie. Franchement, un roi qui proclame que: "l'État, c'est moi !" me paraît moins
répugnant que les Messieurs en question qui leurrent le peuple: "Le
pouvoir suprême, c'est vous !" La lâcheté qui transpire n'a rien de
grand. Si l'on recherche
pourquoi la guerre et la paix alternent dans l'histoire de l'humanité,
toujours on trouve des débordements. Les souverains modérés n'ont jamais eu à
craindre quoi que ce soit. Il est présentement
clair que nous nous dirigeons tout droit sur la prochaine catastrophe. Le
débordement qui nous frappe en ce moment est la stupidité du peuple, qui
refile le fric dans le cul des ploutocrates et la témérité des ploutocrates
qui investissent toujours ce fric dans de nouvelles entreprises. La spirale
tourne. Le tribut du peuple s'accroît vertigineusement. Une petite étincelle
- et déjà une nouvelle période s'effondre. Un espoir que les insensés
retrouvent leurs sens n'existe toujours pas. Que reste-t-il pour
quelqu'un qui n'est le maître de personne, le domestique de personne, qui est
son propre maître, qui n'appartient ni aux ploutocrates ni au peuple? Regarder commet se développe le spectacle?
foutre le camp? grimper sur les barricades?
se terrer? Attendre les balles et les bombes? Rester son propre maître! Si on survit, on saura si c'était un bon conseil. |
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